La parole à Alan, supporter lillois à Prague
PAR MAXIME POUSSET
Imaginez : vous êtes supporter lillois depuis votre enfance, ancien DVE et abonné au Stade Pierre Mauroy. Vous vivez à Prague et votre club de cœur débarque là, chez vous, pour un match d’Europa League… Auquel vous ne pourrez pas assister à cause des conditions sanitaires. Cet ascenseur émotionnel, c’est celui d’Alan, 27 ans (@BartVdVK sur Twitter). Il nous raconte…
Un seul club dans le cœur : le LOSC
« Je suis originaire de Râches, près de Douai. J’ai toujours été un grand supporter du LOSC, depuis l’époque Vahid et la remontée en Ligue 1. J’allais voir les matchs à Grimonprez-Jooris, puis je suis parti faire mes études à Lille au moment du doublé que j’ai donc vécu à 100%, en tribune Nord. Je me suis rapidement abonné avec les DVE au Stade Pierre Mauroy et j’ai participé à des déplacements, à des confections de tifos… »
Tout plaquer et partir vivre à Prague
« Il y a un peu plus d’un an et demi, je venais de finir mes études de commerce et j’étais au chômage. J’ai voulu tenter une expérience à l’étranger. J’ai eu vent, par le biais d’un membre de ma famille, d’opportunités de travail pour les francophones, ici à Prague. J’ai donc pris mon sac à dos et je suis parti à l’aventure. Après un premier job, je suis maintenant en charge de l’expérience client sur le marché français pour une compagnie de bières, au sein d’un customer service center centralisé en République Tchèque. »
Ahoj !
« Au bureau, je parle essentiellement le Français et l’Anglais. Il faut savoir qu’ici en République Tchèque, l’Anglais est suffisant pour vivre au quotidien. Les jeunes le parlent plutôt bien. J’essaye quand même d’apprendre le Tchèque, au moins les basics, car ça facilite la vie pour le resto, les magasins… Et puis c’est une marque de respect et d’intégration. Les Tchèques sont très réceptifs à cela. Ça distingue le touriste de l’expatrié. »
Un virus qui n’a pas de frontières
« La République Tchèque subit une violente deuxième vague de Covid-19. Nous sommes l’un des pays européens ayant le plus haut taux de propagation. Autant la première vague avait été plutôt bien gérée ici, avec un confinement général décrété très tôt et des frontières fermées immédiatement. Mais le déconfinement a sans doute été vécu avec un peu trop de légèreté, si bien qu’aujourd’hui, nous sommes quasi en confinement. Tous les commerces sont fermés mis à part les magasins de premières nécessités comme les pharmacies et les boutiques alimentaires. On ne peut plus se réunir à part en famille et les sorties sont extrêmement limitées. »
PRAGUE : Une ville de foot
« En dehors de ce contexte, la vie est très agréable ici. Prague est une ville jeune et très ouverte, avec une grosse communauté française. Je ne me sens donc pas seul, j’ai pas mal de potes. Côté foot, j’ai la chance d’avoir deux stades à 20 minutes à pied de chez moi. Celui des Bohemians de Prague et celui de Žižkov, un club de D2. J’ai déjà eu l’occasion d’aller voir jouer le Slavia, mais pas encore le Sparta, car le championnat a été suspendu, comme toutes les compétitions sportives, y compris le hockey, le sport numéro 1 en République Tchèque. »
Le Sparta ? Une équipe offensive
« Le Sparta a réalisé un excellent début de saison avec 6 victoires en 6 matchs, même si selon moi, leur calendrier était très abordable. Ils sortent d’une saison 2019-2020 compliquée (3ème au classement) et semblent cette saison avoir l’ambition de bousculer la domination du Slavia et du Viktoria Plzeň. C’est une équipe assez offensive, qui aime attaquer, qui possède du potentiel devant avec des joueurs de ballon. Ils se projettent vite vers l’avant. Je pense que ce soir, il y aura de beaux duels sur les côtés, notamment. »
Une pépite nommée Hložek
« Hložek ? J’en entends beaucoup parler. Ici, les fans de foot le considère comme le meilleur joueur tchèque depuis la génération des Milan Baroš, Jan Koller et autre Pavel Nedved. Tout le monde sait qu’il quittera le championnat en fin de saison et je pense qu’il a le potentiel pour rallier un club du top 5 d’une grande ligue européenne. C’est un jeune joueur à très haut potentiel, avec des qualités techniques et physiques au-dessus de la moyenne pour son âge. Il dispose aussi d’une vision du jeu assez intéressante. Mais je pense qu’il doit encore progresser dans ses prises de décisions. »
Le LOSC reste favori, mais…
« Pour moi, c’est une bonne chose pour le LOSC de commencer par le Sparta plutôt que le Celtic ou l’AC Milan, car sur le papier, c’est l’équipe dite la plus abordable. Il faudra voir aussi comment le Sparta a pu se préparer du fait de l’arrêt du championnat tchèque. Je vois un match assez équilibré contre une équipe qui, en Europe, a déjà montré qu’elle était difficile à bouger à domicile. Le LOSC reste pour moi le favori, même si ça ne sera pas une promenade de santé. Il faut rester vigilant et serein comme on a su le faire depuis ce début de saison qui est pour moi un quasi sans faute. L’équipe dégage énormément de sérénité, notamment la défense. Pour moi, ce LOSC-là peut viser le podium en fin de saison, mais également un très bon parcours en Europa League. Je pense que c’est à notre portée. »
La frustration de rater LE match à ne pas rater
« Comment je vais vivre le match de ce soir ? J’avais prévu de le regarder entre potes français et tchèques, avec notamment deux supporters du Sparta, mais je pense que je vais devoir le regarder seul, puisqu’en plus des bars fermés, on n’a plus trop le droit de se rassembler en privé. C’est très frustrant. J’ai vécu un gros ascenseur émotionnel au moment du tirage, quand j’ai vu que le LOSC allait affronter un club praguois. Et puis deux minutes plus tard, je me suis rappelé la situation sanitaire. J’ai d’abord espéré que le stade serait ouvert à une affluence limitée. Je me serais alors débrouillé pour trouver une place, mais à mesure que les semaines avançaient et que la situation se dégradait, j’ai vite compris que j’allais devoir le regarder chez moi… »