Bielsa ? C’est ça… (1/2)
PAR MAXIME POUSSET
Plus qu’un entraîneur, Marcelo Bielsa est un mythe. Idolâtré en Amérique du Sud, adulé dans tous les clubs européens où il a exercé, respecté de toute la profession, il s’inscrit comme l’un des grands personnages du football international. Son parcours est presqu’un conte, une légende. Laissez-nous ainsi vous raconter la grande histoire du nouvel entraîneur lillois. Premier chapitre.
Le football est une science. Et Bielsa l’a théorisée
Issu d’une famille de notables de Rosario (Argentine), Marcelo Bielsa s’éprend très vite pour le football qu’il théorise comme une science et pour laquelle il manifeste rapidement une passion absolue. Une passion qu’il s’attèle à mettre en application sitôt sa carrière de footballeur achevée. Après avoir entamé son parcours d’entraîneur auprès des étudiants de l’Université de Buenos Aires, qui d’autre que les Newell's Old Boys, le club de son cœur, de sa jeunesse, peut-il représenter le laboratoire d’une méthode qui s’imposera bientôt comme une référence ?
C’est donc chez lui à Rosario – dans la ville qui, plus tard verra naître Lionel Messi – que cet ancien professeur d’éducation physique écrit les premiers paragraphes de son histoire. D’abord au contact des équipes jeunes à partir de 1982. Pour être certain de ne disposer que des profils qu’il a personnellement ciblé, il sillonne le pays tout entier et recrute personnellement ses joueurs qu’il forme, puis révèle, révolutionnant au passage la politique de détection des clubs argentins. Ces garçons se nomment Batistuta, Balbo, Berizzo, Pochettino ou Sensini et représentent la base de la future équipe d’Argentine.
Des débuts retentissants… à Newell’s, forcément
Après cet incroyable et minutieux travail de fond, Marcelo Bielsa prend finalement la tête de l’équipe première du club rouge et noir à partir de 1990. Le succès est rapidement au rendez-vous puisque les Newell’s Old Boys remportent coup sur coup le titre de champion d’Argentine 1991, puis le tournoi de clôture 1992 avant d’atteindre la finale de la Copa Libertadores 1992 (l’équivalent de la Champions League sud-américaine).
La formule fonctionne, les bases de ce qu’on nomme très vite la "méthode Bielsa" sont posées et la mécanique bien huilée. Déjà, le technicien n’hésite pas à s’appuyer sur une équipe jeune, généreuse dans l’effort et à déployer un football total, caractérisé par une implication continue des onze joueurs dans les taches défensives comme offensives, notamment. Fort de ces incroyables succès ayant dessiné l’essentiel du palmarès des Newell’s, Marcelo Bielsa s’inscrit aujourd’hui encore comme le technicien le plus marquant de l’histoire d’un club dont le stade porte d’ailleurs le nom et où les supporters lui vouent toujours une adoration presque biblique.
Le Mexique avant un nouveau sacre
Bien que jamais rompu sur le plan sentimental, le lien entre les Newell’s et Marcelo Bielsa s’achève pourtant au plus fort de son histoire, en 1992. Homme de projet, il s’implique alors dans celui du CF Atlas (Mexique) dont il opère une profonde restructuration, occupant un rôle élargi de Manager, d’abord en charge du centre de formation, puis de l’équipe première, entre 1992 et 1994. Une brève expérience à la tête du Club América de Mexico (1995) plus tard, il se retire du football pendant un an… avant de revenir à son premier amour, le prestigieux championnat argentin.
Mais cette fois, c’est dans le costume d’entraîneur de l’illustre Vélez Sarsfield que celui qu’on surnomme El Loco retrouve son pays. Là encore, l’aventure dure une saison (1997-1998). Et quelle saison ! Sous la bannière du club de l’ouest de Buenos Aires, notre homme remporte un nouveau titre de champion en 1998 aux côtés des Chilavert et autres Pellegrino, Cavallero ou Castroman...
Médaillé d’Or aux J.O. L’Argentine tout en haut
Ces succès retentissants, cette notoriété grandissante lui ouvrent naturellement les portes du Vieux Continent qu’il découvre d’abord brièvement sur le banc de l’Espanyol Barcelone en 1998. Une expérience de très courte durée puisqu’il est appelé au chevet de la sélection argentine quelques semaines à peine après son arrivée en Espagne. Impossible pour lui de refuser le prestigieux banc d’une Albiceleste.
L’aventure est intense, elle dure six ans. Passée l’immense déception d’une élimination prématurée en poules lors de la Coupe du Monde 2002, sa sélection ciel et blanche atteint la finale de la Copa América 2004, mais les Heinze, Zanetti, Mascherano, Lucho, Tevez et consorts s’inclinent aux tirs au but contre le Brésil. Quelques mois plus tard, Marcelo Bielsa achève cette aventure avec succès par une médaille d’or aux Jeux Olympiques d’Athènes.
Adulé au Chili avant le grand saut en Europe
L’expérience est riche, l’homme la vit avec intensité. La prise de recul qui s’en suit s’avère d’ailleurs extrêmement précieuse dans le retour de Marcelo Bielsa. Un retour qui intervient trois ans plus tard, en 2007, toujours à la tête d’une sélection nationale d’Amérique du Sud. Rendez-vous au Chili, cette fois, pour un projet au long cours qui durera trois ans et demi. Comme à l’accoutumée, le technicien argentin appose immédiatement sa griffe sur l’organisation du football local et sur son système de formation.
Après 2002 avec l’Albiceleste, il se qualifie en 2010 pour sa deuxième Coupe du Monde, offrant à la Roja sa première participation à un Mondial depuis douze ans. Et parce qu’un exploit n’arrive jamais seul, il parvient également à mener en 1/8e de finale une prometteuse génération (Medel, Vidal, Isla, Sanchez) à qui il n’a pas hésité à confier les clés de la sélection malgré leur jeune âge. Aujourd’hui encore, El Loco est perçu comme l’un des techniciens les plus marquants de l’histoire d’un football chilien fasciné par sa personnalité et dont il a profondément changé la mentalité, s’inscrivant à la base de l’émancipation.