Les frères Cheyrou, une histoire Lilloise

PAR MAXIME POUSSET

Même nom, même sang, même maillot. Entre 1999 et 2002, lorsque le LOSC sillonnait les terrains de D2, de Ligue 1, puis de Champions League, il y avait bien souvent un Cheyrou sur la feuille de match. Voici l’histoire de deux frangins lillois. Voici l’histoire de Bruno et Benoît.

Les plus fidèles supporters du club aux quatre lettres se souviennent forcément des frères Plancque (Pascal et Stéphane), ensemble sous le maillot lillois entre 1980 et 1987. Ou peut-être même des frangins Robail (Mathieu et Samuel), Dogues en même temps, en 2006-2007. Mais s’il y en a deux qu’aucun amoureux du LOSC ne peut oublier, ce sont bien Bruno et Benoît Cheyrou, unis sous le maillot de l’équipe première du LOSC entre 1999 et 2002. Contrairement aux deux fratries précitées, ces deux-là ne sont pas originaires de la métropole lilloise, ni même des Hauts-de-France. Leur venue au LOSC tient à un concours de circonstances autant qu’à la vista d’un homme : Jean-Michel Vandamme, alors à la tête d’un centre de formation lillois. Il se souvient.



Icon_pa_371942.jpg« En 1993, je reprends la direction du centre de formation du LOSC après une très courte expérience au RC Lens. Dès mon retour, j’essaye de recruter un jeune garçon de 15 ans très talentueux nommé Bruno Cheyrou, qui évoluait alors en région parisienne et que j’avais détecté pour le compte du RCL. J’adorais sa prestance, son allure, sa classe sur le terrain. Malheureusement, j’étais trop en retard sur le dossier, les négociations étaient trop avancées avec Lens et il y a signé », raconte 27 ans après celui qui a passé 42 années au LOSC, un club qu’il a d’ailleurs retrouvé l’été dernier en qualité de Manager Général du centre de formation.



« Entre temps, notre équipe du LOSC U15 alors dirigée par Rachid Chihab, est championne de France », poursuit JMV. « Lors d’un match de cette génération contre le Racing Club de Paris, un gamin me saute aux yeux. C’était le capitaine, avec une personnalité exceptionnelle, beaucoup de caractère. Il reprenait ses partenaires de volée, les remettait en place. Un vrai patron. Je tombe raid dingue de ce gosse, avec une belle patte gauche. Je me dis : "lui, je ne dois pas le rater". Je me renseigne et j’apprends qu’il s’appelle Benoît Cheyrou et qu’il est le frère de Bruno, dont je connais déjà bien la famille. »

Deux Cheyrou au LOSC à 3 semaines d'intervalle



Dans le même temps, tout ne se passe pas comme prévu pour Bruno chez les Sang et Or. Il y vit des premiers pas pourtant prometteurs en équipes jeunes, sous la houlette de Daniel Leclercq, puis ne parvient plus à gagner la confiance des entraîneurs successifs. Après trois saisons, le RCL ne lui propose finalement pas le contrat stagiaire tant espéré. Un coup dur pour le jeune homme immédiatement transformé en opportunité pour le LOSC. Jean-Michel Vandamme raconte : « Un jour, le papa avec qui j'étais donc à nouveau en contact pour Benoît, m’appelle et me propose le deal suivant : j’aide Bruno à se remettre en selle au LOSC et en retour, Benoît, qui était sollicité par beaucoup de clubs, rejoint notre centre de formation. » Banco. Nous sommes en 1997 et les deux frangins de 19 et 16 ans débarquent au LOSC à trois semaines d’intervalle.  



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Un an après, Bruno, 20 ans bascule déjà chez les pros alors en Ligue 2. Il s’en souvient avec mélancolie. « Le stade était à Grimonprez-Jooris, le vestiaire en bas, le terrain d’entraînement de l’autre côté de la route, dans le parc de la Citadelle. Les infrastructures n’étaient pas du tout celles d’aujourd’hui. Il est clair que le LOSC a basculé dans la modernité depuis et c’est une bonne chose. Mais je crois qu’on est tous un peu nostalgiques de cette époque, de cette ambiance, de ce stade. »



Sur le terrain, le percutant attaquant excentré découvre alors Vahid Halilhodzic et sa méthode, son exigence, son charisme. « Si je devais résumer son style, je dirais beaucoup de volonté, de cohésion et de détermination. Collectivement, nous étions capables de renverser des montagnes. Vahid a vraiment réussi à nous insuffler le dépassement de soi, le fait de n’avoir peur de personne et d’être capable de battre n’importe qui. Je peux l’affirmer sans hésiter : sans lui, sans le travail qu’il m’a fait faire, je n’aurais jamais eu la carrière que j’ai eu, je n’aurais jamais connu Liverpool. Il était le coach qu’il nous fallait à ce moment-là, c’est évident ».



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Très vite, Bruno Cheyrou devient l’un des atouts offensifs majeurs d’un LOSC qui ne cesse de surprendre, qui retrouve l’élite en 2000, puis découvre la scène européenne l’été suivant. Pendant ce temps-là, le petit frère pointe le bout de son nez. Un an après les premiers pas de Bruno sous le maillot lillois, c’est Benoît, 18 ans, qui tape maintenant à la porte des pros. Il se rappelle: « Le fait d’avoir mon frère auprès de moi m’a aidé, car les étapes que j’étais en train de franchir, Bruno les avaient déjà franchies quelques années auparavant. Il était donc la meilleure personne pour me conseiller, pour m’aider à passer tous ces obstacles. Et puis pour moi qui vivais au centre de formation, avoir un frère avec un appart à Lille, c’était un soutien précieux. »

Ensemble sous le maillot lillois, en Champions League



Saison 1999-2000, le LOSC survole la D2 et voilà deux Cheyrou sur la feuille de match. Au départ, le benjamin n’apparaît qu’à travers quelques bouts de rencontres pendant que l’aîné continue de performer. Puis Benoît s’impose de façon plus régulière à partir de 2001-2002 aux côté d’un Bruno en pleine explosion et alors que les Dogues ont retrouvé l’élite. « Notre passage au LOSC restera notre seule expérience commune dans un club », constate aujourd’hui Benoît avec le recul. « J’en garde forcément de grands souvenirs. À l’entraînement, c’était un peu spécial. Quand il y avait un ballon à jouer, on n’osait pas trop aller au contact de peur de blesser l’autre, mais en match, c’était toujours un plaisir, avec une grande complicité. » Bruno va plus loin : « C’était génial de pouvoir jouer avec son frère. En plus, n’avons jamais été en concurrence. Moi je jouais devant tandis que lui était surtout au milieu. »



Ensemble, les frangins disputent la Champions League 2001-2002, un moment magique qu’ils n’oublieront jamais. « J’ai eu beaucoup de chance d’arriver dans le groupe à un moment charnière », rembobine Benoît. « On monte en D1, puis on se qualifie en Champions League. C’était un apprentissage express. » Bruno confirme : « C’est allé très vite pour tout le monde, mais rien ne va jamais trop vite quand on travaille dur. Ce genre de grand match représente le but ultime pour tout footballeur. Les drapeaux, les étoiles, la musique. C’est une compétition qui vient récompenser tous les efforts que tu fais depuis tout petit. Et pour la petite anecdote, j’ai finalement réussi à jouer à Bollaert, mais c’était avec le LOSC et en Champions League. Je me souviens qu’à l’époque, certains dirigeants lensois n’étaient pas forcément fiers de voir le joueur à qui ils n’avaient pas proposé de contrat, disputer l’Europe avec le club rival… »



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Icon_pa_469945.jpgBruno Cheyrou

Né le 10 mai 1978 à Suresnes (92)

Attaquant



Clubs successifs :

France_11.png Savenay 44

France_11.png Racing 92 (1986-1994)

France_11.png RC Lens (1994-1997)

France_11.png LOSC (1997-2002)

Angleterre_0.png Liverpool (2002-2004)

France_11.png Olympique de Marseille (2004-2005)

France_11.png Girondins de Bordeaux (2005-2006)

France_11.png Stade Rennais (2006-2010)

Chypre.png Anorthosis Famagouste (2010)

France_11.png FC Nantes (2010-2012)

France_11.png AC Boulogne-Billancourt (2014-2015)



International A France_11.png (3 sélections)

Palmarès : Champion de France D2 2000 (LOSC)

 

Icon_ONZ_090103_08_03.jpgBenoît Cheyrou

Né le 3 mai 1981 à Suresnes (92)

Milieu de terrain



Clubs successifs :

France_11.png Racing 92 (1992-1997)

France_11.png LOSC (1997-2004)

France_11.png AJ Auxerre (2004-2007)

France_11.png Olympique de Marseille (2007-2014)

Canada_0.png Toronto FC (2015-2017)



International Espoirs France_11.png

Palmarès : Champion d’Europe U18 2000 (France) ; champion de France D2 2000 (LOSC), vainqueur de la Coupe de France 2005 (AJA) ; vainqueur de la Coupe de la Ligue 2010, 2011 et 2012 (OM) ; champion de France 2010 (OM) ; vainqueur du Trophée des Champions 2010 et 2011 (OM) ; champion du Canada 2016 et 2017 (Toronto) ; vainqueur de la Coupe MLS 2017 (Toronto)